La rétention administrative est une mesure privative de liberté décidée en vue de l’exécution d’une mesure d’éloignement (article L.263-1 du CESEDA). En raison de son caractère privatif de liberté au sens de l’article 66 de la Constitution de 1958, la prolongation de sa durée est soumise au contrôle strict du juge des libertés et de la détention.
Ainsi, c’est à titre exceptionnel que l’ancien article L.552-7 du CESEDA (abrogé depuis et remplacé par l’article L 742-5, 1° du même CESEDA) prévoyait qu’une quatrième prolongation de la mesure pouvait être prononcée, dans l’hypothèse où l'étranger avait fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement (portant la durée totale de la rétention à 90 jours).
Dans le contexte de la crise sanitaire, s’est posée la question de savoir si le refus d’un étranger de se soumettre au test PCR exigé par les compagnies aériennes dans le cadre de l’exécution d’une mesure d’éloignement, pouvait être qualifié d’obstruction au sens de ces dispositions.
Une réponse a finalement été apportée par la Cour de cassation dans l’affaire ici commentée. (Civ. 1ère, 14 septembre 2022, n°21-13.462, au Bulletin).
En l’espèce, un étranger ayant fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français a été placé en rétention administrative. Cette mesure a été prolongée à trois reprises. Une quatrième prolongation a été autorisée par ordonnance du juge des libertés et de la détention sur le fondement de l’article L552-7 du CESEDA, l’intéressé ayant refusé de se soumettre à un test PCR. Cette ordonnance a été infirmée par le premier président de la cour d’appel de Douai, qui a ordonné la remise en liberté immédiate de l’étranger. Le préfet a formé un pourvoi en cassation.
Dans cette décision publiée au bulletin, la première chambre civile infirme l’ordonnance attaquée. En effet, elle affirme que par principe, « caractérise une telle obstruction » au sens de l’article L552-7, alinéa 5 du CESEDA « le refus de se soumettre à un test PCR de dépistage de la Covid 19 exigé par la compagnie aérienne avant l’embarquement ».
La Cour de cassation prévoit cependant une exception : l’obstruction ne sera pas caractérisée si le refus de se soumettre au test est « justifié par des raisons médicales dûment constatées ».
Comme le relève Christophe Pouly, cela signifie que « des allégations ne suffisent pas : il faut qu’un certificat médical atteste de l’impossibilité de réaliser le test»[1].
En l’espèce, le premier président n’ayant pas recherché s’il existait des raisons médicales justifiant le refus de l’intéressé, sa décision est censurée pour défaut de base légale au regard de l’article L 552-7 alinéa 5 du CESEDA, dans sa rédaction issue de la loi n°2018-778 du 10 septembre 2018.
Il est à signaler par ailleurs que depuis la loi du 5 août 2021, le refus d’un étranger de se soumettre au test PCR exigé par les compagnies aériennes dans le cadre de l’exécution d’une mesure d’éloignement est constitutif du délit de soustraction à l’exécution d’une mesure d’éloignement au sens de l’article L.824-9 du CESEDA.
Olivia Feschotte-Desbois et Juliette Thibaud (stagiaire)
[1] C. Pouly, « Refuser de se soumettre à un test PCR sans motif médical constitue une obstruction à l'éloignement », La Veille Permanente des Editions Législatives, 20 septembre 2022