20 mai 2016 - L’office du juge d’appel en cas d’exercice d’une voie de recours erronée à l’encontre d’une sentence arbitrale - Delphine Archer et Denis Garreau

Par un arrêt du 11 mai 2016 (n° 14-29.767, à paraître au Bulletin), la première chambre civile de la Cour de cassation a apporté d’intéressantes précisions concernant l’office du juge d’appel en cas de recours exercé à l’encontre d’une sentence arbitrale.
En l’occurrence, le compromis d’arbitrage fermait la voie de l’appel.
Cependant, on sait que même dans ce cas, il est toujours loisible aux parties d’exercer un recours en annulation, lequel est strictement encadré par l’article 1492 du code de procédure civile qui prévoit des cas limités d’ouverture d’un tel recours.
Or, en l’espèce, par erreur, la partie ayant entendu exercer un recours contre la sentence litigieuse, avait intitulé son recours « appel » au lieu de « recours en annulation ».
La cour d’appel de Paris a jugé cet appel irrecevable et la Cour de cassation, par l’arrêt commenté, a confirmé cette solution en rejetant le pourvoi formé contre son arrêt du 28 octobre 2014.
Pour parvenir à cette solution, la Cour de cassation a adopté un raisonnement  très pédagogique dont les quatre temps doivent être retracés.
Ainsi, elle a d’abord rappelé que la société en cause avait interjeté appel de la sentence arbitrale alors que la convention d’arbitrage excluait cette voie de recours.
Ensuite, elle a relevé que « les moyens invoqués par l’appelante, tirés de l’article 1492 du code de procédure civile, n’ont pas pour effet de modifier la qualification de la voie de recours, improprement exercée, qui résulte de l’acte de saisine de la juridiction».
Elle a précisé aussi qu’il n’appartenait pas à la cour d’appel de « substituer d’office à la voie de l’appel, tendant à la réformation de la sentence, celle du recours en annulation ».
Enfin, elle a précisé que le refus de requalification de la voie de recours par la cour d’appel
« ne constituait pas une atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge, au regard de l’objectif poursuivi, en matière d’arbitrage interne, d’assurer l’effectivité de la sentence en imposant aux parties de n’exercer que la voie de recours qu’elles ont prévue ».
La cause est entendue : la partie qui entend exercer un recours à l’encontre d’une sentence arbitrale n’a pas droit à l’erreur et doit s’en tenir fidèlement aux termes de la convention d’arbitrage, dont la force est assurée par la Cour de cassation.
Cette décision s’inscrit donc dans la tendance au renforcement de la sécurité juridique dans le domaine de l’arbitrage.

Delphine Archer et Denis Garreau