27 septembre 2013 – Inconstitutionnalité des dispositions relatives au taux d’intérêt majorant les sommes sujettes à répétition en vertu de l’article L 411-74 du code rural et de la pêche maritime - Jean-Baptiste Millard

L'article L. 411-74 du code rural et de la pêche maritime, applicable en matière de baux ruraux, contraint tout bailleur, tout preneur sortant ou tout intermédiaire qui aura, directement ou indirectement, à l'occasion d'un changement d'exploitant, soit obtenu une remise d'argent ou de valeurs non justifiée, soit imposé la reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci, à restituer les sommes au preneur entrant.

Par un arrêt du 9 juillet 2013 (n° 13-40024 QPC), la Cour de cassation  a considéré comme sérieuse la question prioritaire de constitutionnalité portant, sur les dispositions du 2e alinéa de l'article L. 411-74 du code rural et de la pêche maritime, en ce qu’il majore les sommes indûment perçues sujettes à répétition à compter de leur versement d’un intérêt égal au taux pratiqué par la Caisse régionale de Crédit agricole pour les prêts à moyen terme.

C’est ce taux d’intérêt, et plus précisément les mots « et égal au taux pratiqué par la Caisse régionale de Crédit agricole pour les prêts à moyen terme » que le Conseil constitutionnel, dans une décision du 27 septembre 2013 (n° 2013-343 QPC), a décidé de déclarer contraires à la Constitution, aux motifs :

- qu’en s'abstenant de fixer ou d'habiliter le pouvoir réglementaire à fixer les modalités selon lesquelles le taux prévu par les dispositions contestées est déterminé et rendu public, le législateur a méconnu l'étendue de la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution ;  
- que l'absence de détermination des modalités de calcul du taux d'intérêt applicable à une créance affecte par elle-même le montant des sommes allouées et, par suite, le droit de propriété tant du créancier que du débiteur.

Le Conseil constitutionnel a toutefois entendu user des dispositions de l’article 62 de la Constitution, qui lui réservent le pouvoir, tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets, que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de la déclaration d’inconstitutionnalité.
Aussi a-t-il décidé de reporter au 1er janvier 2014 la date de l’abrogation des dispositions en cause.
Il a également retenu, pour préserver l'effet utile de sa décision à la solution des instances actuellement en cours, qu’il appartenait, d’une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi ou, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2014 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de sa décision.

Jean-Baptiste Millard